Les récents accidents de chasse médiatisés dans lesquels des promeneurs ont été tués, blessés, ou simplement inquiétés, ont provoqué un vif débat sur le partage des forêts et campagnes entre promeneurs et chasseurs. Jean-Philippe Morel, avocat au barreau de Dijon, revient pour France-Soir sur l’encadrement de cette pratique.
La chasse est une activité qui déchaîne les passions avec ses adeptes et ses détracteurs. Aux termes de la loi, la chasse participe à la gestion durable des territoires : « La pratique de la chasse, activité à caractère environnemental, culturel, social et économique, participe à cette gestion et contribue à l’équilibre entre le gibier, les milieux et les activités humaines » (article 420-1 du code de l’environnement). Cela suppose que les chasseurs exercent leurs activités « dans le respect des propriétés, des cultures et des récoltes » (Art. L. 422-2 du code de l’environnement).
Dans la plupart des départements, la saison de chasse s’étend de septembre à février, mais peut commencer avant et finir après, dans certains endroits, pour certaines espèces. Les dates d’ouverture de la chasse par saison et par département sont consultables sur le site de l’Office Nationale de la Chasse et de la Faune Sauvage (ONCFS).
En période de chasse, il convient d’assurer le partage de la nature entre les différentes pratiques des usagers de la nature. Les chasseurs ont des droits mais également des devoirs, notamment en matière de sécurité.
Voir: Accidents de chasse – un député crée la polémique en proposant d’interdire le VTT
Normalement un chasseur n’a pas le droit de tirer près des routes communales, départementales et nationales, et les chemins ouvert à la circulation publique et ce, en vertu de l’interdiction d’utiliser des armes à feu sur ou en direction des axes de circulation.
S’agissant des chemins d’exploitation la décision de permettre ou non la chasse sur cet espace revient au propriétaire du terrain.
Globalement sur les chemins et propriété privée les chasseurs doivent obtenir une autorisation des propriétaires. Avec une exception, s’il existe une association de chasse agréée, l’ensemble du territoire couvert par l’association est ouvert à la chasse, sauf si le propriétaire s’y oppose. Dans ce cas il est nécessaire d’affirmer son souhait d’interdire la chasse et de l’afficher clairement sur son terrain en disposant des panneaux « chasse interdite ». Pour cela, le propriétaire doit adresser un courrier recommandé au Président de la société de chasse en précisant l’interdiction de la chasse sur sa propriété en vertu de l’article L.422-1 du Code de l’Environnement.
La chasse sur le terrain d’autrui sans le consentement du propriétaire ou du détenteur du droit de chasse relève d’une contravention de 5ème classe, donc d’une amende de 1.500 euros maximum, qui peut être augmentée en cas de circonstances aggravantes.
A l‘inverse lorsque la chasse est licite, le code de l’environnement prévoit qu’« est puni de l’amende prévue pour les contraventions de la 5ème classe le fait, par des actes d’obstruction concertés, d’empêcher le déroulement d’un ou plusieurs actes de chasse ».
Même si le terrain n’est pas autorisé à la chasse, le propriétaire ne peut toutefois pas empêcher les chasseurs d’y passer dès lors qu’ils veillent à la sécurité des animaux et qu’ils ne créent pas de dommages. Le droit de chasse et le droit de passage sont en effet à distinguer. Il n’y a pas fait de chasse sur le terrain d’autrui et donc pas d’infraction quand le chasseur va tuer l’animal qu’il a déjà mortellement blessé, ou ramasser un gibier tué dans des conditions licites. Le droit de suite du gibier mortellement blessé est donc permis sur le terrain d’autrui.
Si des chasseurs bénéficient du droit de chasse sur un terrain, ils peuvent y chasser, mais en prenant les mesures nécessaires pour ne pas effrayer les animaux domestiques qui s’y trouvent et ne pas les laisser s’échapper.
Il existe également une disposition qui interdit de chasser dans un rayon de 150 m autour des habitations mais qui ne s’applique qu’aux chasseurs appartenant à une association de chasse communale agrée.
Les associations peuvent aussi instituer des règles librement dans leurs règlements, leur non-respect pouvant conduire à des amendes statutaires ou des sanctions privant temporairement, voire définitivement de la possibilité de chasser sur ce territoire.
En plus de ces sanctions, un chasseur imprudent peut être sanctionné pénalement, en cas du non-respect d’une règle de sécurité, avec mise en danger d’autrui, les peines pouvant aller du retrait de permis de chasser ou de l’interdiction de détention d’une arme, jusqu’à l’emprisonnement.
Lorsque le chemin est une voie du domaine privé d’une collectivité locale ou de l’État, non ouverte à la circulation des véhicules à moteur des particuliers, la chasse est possible sous réserve d’avoir obtenu préalablement l’accord des détenteurs du droit de chasse, et de respecter les réglementations, instaurées par le maire ou du préfet, en vertu de leurs pouvoirs de police, limitant ou interdisant la chasse sur ces chemins.
Terminons par une note de légèreté avec un proverbe africain « aussi longtemps que les lions n’auront pas leurs historiens, les récits de chasse tourneront toujours à la gloire du chasseur » .