Avant même d’être rendue possible par la loi Pacte, la privatisation d’Aéroports de Paris a été l’objet d’une procédure de referendum d’initiative partagée. Si elle a réuni le nombre de parlementaires nécessaires, il lui reste encore plusieurs étapes à passer pour aboutir, détaille pour France-Soir Jean-Philippe Morel, avocat au barreau de Dijon.
Le « Référendum d’Initiative Partagée », le « RIP », peut-il empêcher la privatisation d’Aéroports de Paris?
La loi Pacte prévoit notamment de supprimer l’obligation de l’Etat d’être l’actionnaire majoritaire au capital de la société des aéroports de Paris. L’Etat détient 50,63 % de cette société.
L’Etat était jusqu’alors tenu par la loi de conserver la majorité des parts du groupe aéroportuaire. Le Parlement a adopté définitivement la loi Pacte le jeudi 11 avril.
Pour tenter de bloquer cette « privatisation » de la société des aéroports de Paris, des élus de différentes sensibilités politiques ont précédemment à son adoption, mis en œuvre la procédure de « référendum d’initiative partagée ».
Prévu par l’article 11 de la Constitution depuis 2008, ce « référendum d’initiative partagée » n’avait jamais été utilisé auparavant.
Il suppose plusieurs étapes: dans un premier temps une initiative parlementaire, qui devra être ensuite soutenue par les citoyens.
La proposition de loi référendaire des parlementaires doit porter « sur l’organisation des pouvoirs publics, sur des réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent ».
Elle doit être signée par un cinquième des parlementaires, puis être validée par le Conseil Constitutionnel qui en étudie la conformité à la constitution.
Après cette phase parlementaire, pour que la procédure aille plus loin, les citoyens doivent s’approprier la proposition de loi référendaire, car celle-ci doit être signée par 10% du corps électoral, ce qui représente près de 4.5 millions d’électeurs.
Pour l’heure, cette proposition de loi référendaire a été signée par 218 signataires issus de différents groupes parlementaires de l’Assemblée nationale et du Sénat et a donc franchi le premier obstacle juridique, celui du cinquième des parlementaires. Il en fallait au minimum 185.
Le « RIP » peut donc passer à l’étape supérieure de l’examen par le Conseil Constitutionnel.
Cette proposition de loi référendaire pourrait alors ensuite, soit être votée par les deux chambres, ou, à défaut d’être présentée au parlement, être soumise au référendum.
La difficulté qui se pose pour le RIP, c’est que l’adoption de la loi Pacte par l’Assemblée en dernière lecture le 11 avril, va conduire à sa promulgation après examen éventuel du conseil constitutionnel, s’il est saisi.
La voie du référendum sera alors fermée pendant un an car notre Constitution prévoit l’irrecevabilité d’une proposition de loi référendaire qui aurait « pour objet l’abrogation d’une disposition législative promulguée depuis moins d’un an ». (Constitution de 1958, article 11 alinéa 3).
La procédure du RIP est donc concrètement particulièrement délicate à mettre en œuvre, et ne pourra pas empêcher la cession par l’Etat de ses parts dans la société des aéroports de Paris.